Plongée dans le disque

C’est une de ces choses que l’on fait quand on a plus rien à faire, quand on ne veut pas réviser les partiels, en flottement, dans ces périodes que je déteste. Mon ordinateur fixe est une ensemble bouillonnant de fichiers et de dossiers qui s’entremêlent les uns avec les autres. CORPS est en trois parties, avec des sauvegardes aléatoires, j’ai tous les rushs de quasiment tous mes films. Mon ordinateur, c’est un bordel quand il s’allume, comme si on entrait dans une maison habitée depuis 40 ans par quelqu’un qui garde tout. J’ai aussi un disque dur externe, 2 To, quasiment plein. Mais voilà, cet été je prévois de travailler un peu sérieusement, de monter des films, au moins deux, et cette situation ne peut plus durer !! J’entreprends alors de trier mon disque, de réinitialiser mon ordinateur.

Il y a 3 ans déjà que je ne l’avais pas fait. 3 ans que s’accumulent des vidéos. Heureusement, tous mes fichiers textes sont dans le cloud, car là je crois que je pleurerai de voir tous les .odt de partiel et rendus de la fac. En fait, il n’y a qu’à peine de ma vie dans ce disque, rien de mes productions textuelles, rien de ce que je fais sur mon ordi portable… C’est déjà trop. Et la peur qui me guette en écrivant ces lignes, celle de voir s’envoler mon compte google et tous ces fichiers sauvegardés nulle part. Voilà bien quelque chose de pire que d’avoir 2 maisons, et tel des enfants de divorcés, chacun de nous a des affaires à droite et à gauche dont il espère pouvoir retrouver la trace. BREF. J’entreprend donc de tout ranger, de séparer les fichiers projets des .mp4, de trier trier trier. 

Doit on garder les rushs ? Infinie question qui se règle au corps à corps avec chacun desdits films. CONTRE : je n’irai jamais les revoir, et puis je m’en fou ! POUR : Mais si je veux refaire un export, un jour ? Si je veux changer une scène… Il y a une scène dans CORPS que je rêve de changer, mais quoi, pourquoi, je n’en ai pas la force. À ce compte on peut tout réécrire tout le temps, ça ne sert à rien ! CONTRE ALORS, autant tout supprimer, tout oublier, rendre les “exports finaux” finaux, finir totalement ce qui l’est presque déjà… Mais Pudovkin remonte à mes oreilles, lui qui expliquait que le montage était une écriture, et que le tournage revenait à rassembler les mots. Si chaque film vient avec son dialecte, peut on vraiment jeter ses mots ? Des mots qui ne servent plus, comme un langage indigène, qu’on voudrait quand même conserver, et puis refaire parler, peut être, ne sait on jamais. POUR. Enfin on garde les rushs de ce qui n’est pas trop vieux, le reste est déjà perdu…

Les MP4 s’amoncellent dans un grand dossier que j’ai appelé “deepstorage”. DEEP, profond, comme l’effet que ça me fait de revoir mes films. Et puis à la fois un peu froid. Je me rend compte qu’il y a bien une cinquantaine de .mp4, une cinquantaine de films qui vont du personnel au film de commande. Une cinquantaine quand même… Je n’avais pas cru en faire autant.

Mais en dehors des films il y a aussi tout le reste, des photos que je n’ouvre pas, alors là vraiment pas. Il est que je déteste les photos, je n’en prends pas, et pourtant j’ai parfois vidé une carte SD contenant des visages familiers. Autant le passé filmique est supportable, autant voir tout ça ne m’intéresse pas. Enfin ça me touche, bien sûr, mais jamais je ne les trierai. Je suis incapable de faire un album photo, alors tout est mélangé, vaguement classé en fonction du jour ou j’ai vidé la carte SD, vaguement classé par lieu, ou pas classé du tout.

Je met tout sur mon seul disque dur externe et décide de réinitialiser l’ordinateur. Tous les fichiers sont là, et si le disque tombe il n’y a plus rien. Et puis l’ordinateur se rallume, je rebranche le disque et re-glisse certains fichiers. “deepstorage”, quelques projets, et le reste, j’y tiens mais pas assez, peut être que ça disparaitra. Je glisse sur la touche suppr et tout un pan de Paul et Elle disparaît – et merde… Perdre un disque c’est comme voir sa maison brûler, et finalement, c’est peut être libérateur. 

Mais derrière ça, je retrouve surtout les fameux rushs, des vidéos à la gopro de Roméo qui fait l’idiot. Des vidéos d’un petit film, un truc marrant de quand j’avais 12 ans. Le film, je ne l’ai jamais monté, même si j’ai longtemps dit que j’allais le faire. Alors quoi j’ai bientôt 21 ans, je peux le faire, je crois. Je monte le film, rigole beaucoup, et l’envoie à Roméo, qui rigole beaucoup, et me dit d’enfouir ça. Et puis aujourd’hui, pour écrire l’article, je branche mon disque dur externe et retombe sur Nuages… un script de long, enfin un script de moyen. Je le relis, retombe amoureux du film, quelques idées viennent. Il y a 1 heure je l’avais oublié. C’est marrant comme on peut oublier. Maintenant pourtant c’est pour de vrai, comme au cinéma, le passé s’anime.

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