Par exemple, dans Le Miroir, la scène de la rencontre entre l’héroïne et l’inconnu, joué par Anatoli Solonitsyne, nous a paru exiger, à l’instant du départ de ce dernier, une sorte de lien pour unir ces deux personnages qui semblaient s’être rencontrés par hasard. Si, en partant, il s’était retourné pour jeter un regard expressif à l’héroïne, tout serait devenu linéaire et faux. C’est alors que nous est venue l’idée du coup de vent dans le champ, dont la soudaineté surprenait l’inconnu, et l’amenait à se retourner…
Andreï Tarkovski, Le temps scellé, 1985.
Est-ce pousser trop loin la psychanalyse que de dire le fait suivant ? Décembre 1999, une tempête ravage la France. La cheminée de la maison tombe, s’arrache. Clapotis des tuiles cassées sur le sol, de l’eau, du vent. Et moi, là dedans, tout juste en formation dans le ventre de ma mère. Les premiers sons, si forts qu’ils arrivent à mes oreilles qui n’existent pas encore sont ceux-là : le vent, les masses d’air qui s’emportent d’elles mêmes, frappent les murs, les feuilles, la mer. Février 2010, une autre tempête. Ma ville natale est coupée en deux. Au Nord, ils sont sous l’eau. Les maisons du bord de mer voient tout s’en-aller, un frigo avec les huîtres. Et moi, juste derrière, je dors comme un bébé. Le lendemain, j’attrape un appareil photo, et j’immortalise les images de l’après. Pourtant, je ne les imprime pas, j’en fais un montage vidéo.