Les ordinateurs fonctionnent à peu près comme : une grande mémoire, une petite mémoire vive et un processeur. L’algorithme se donne pour mission de relier les informations de la mémoire vive avec la grande mémoire, il suggère et donne à penser au processeur.
L’algorithme de suggestion est dans nos vie de Facebook à Netflix, en passant par Tinder. Vraisemblablement, nous humains, fonctionnons quasiment similairement à un ordinateur : notre grande mémoire acquise (et quelques restant tabula non rasa), la journée et nos pensées.
L’idée
Dans toute activité créatrice, pour construire une idée, notre cerveau compose des informations passées ou présentes. Prenons en exemple : ce matin, j’entends ma voisine balayer à 7 heure sa cour, je suis choqué ; je me souviens du film que j’ai vu avant hier, The great Debaters qui se déroule dans l’Amérique noire des années 50. Pourquoi ne pas faire un film sur un balayeur noir dans les années 50 ?
De là, ma pensée va composer, bondir de blocs en blocs et naîtra ma composition. Par exemple : et si le balayeur travaillait dans un quartier blanc, cela relève le contexte… Oh et il pourrait se lier d’amitié avec une famille, une femme, une enfant ? Cette enfant grandirait ? Elle deviendrait avocate ? Et Brigitte Macron dans tout ça ?
Nouvelles acquisitions
Mais je ne m’arrêterai pas là. Pris dans mon idée, je souhaiterai aussi me renseigner plus en détail : par exemple, combien gagne un balayeur ? Cherchant cette information, je pourrai tomber, par hasard, sur une autre information, disons un dispositif de logement social datant du New Deal et acquérir ce nouveau bloc, sur lequel se fondera mon idée.
Ressortons Bourdieux, évidemment que nous sommes déterminés. Mais cette acquisition, si je la fais grâce à un livre, en regardant un film, par un article trouvé sur Google (dont j’estime l’algorithme sur ce genre de recherche, d’influence négligeable) est bien le fruit d’un hasard. Je n’avais peut être pas 10 articles à lire, mais j’ai choisi celui là, et de ça ma pensée bondit.
Chemins balisés
Et là se trouve le problème de l’algorithme.
Lorsque je suis sur Youtube, sur Facebook, celui-ci ne peut me proposer que des choses en rapport à ce que je connais déjà. Comme mon cerveau me dirais vous ? Oui… Mais non. Puisque l’algorithme, motivé de l’efficience, du clic, ne proposera que les ponts fort, que les choses dont il est sûr que ça me plaira. L’algorithme n’ira jamais chercher l’insignifiant mot, ma voisine balayant, mais préférera le certain : il aime les brunes, proposons lui des brunes. Ma pensée, guidée alors par l’algorithme, ne sera plus bondissante d’idées volatiles en sujets connus, mais juste rampante, se limitant à parcourir le champ du passé.
La suggestion, même si elle semble relever d’un hasard ; prenons une vidéo sur Youtube d’un sujet jusqu’ici inconnu, ne sera évidemment que la composition des moyennes d’intérêt des personnes qui me ressemblent statistiquement.
Réduction du champ de la conscience
Comme une maladie mentale, la pensée algorithmique nous laisse toujours dans le champ du connu. Plus on fréquente l’algorithme, plus celui-ci nous contamine, au point que nous devenions alors l’exemple de Bourdieu. Les suggestions sont vaines, toujours mi-nouvelles, et on se forme un monde à l’image du flux Facebook, cadrant parfaitement avec nos idées.
L’algorithme nous détache d’une réalité plurielle qu’il simplifie. Privilégiant les associations faciles et approximations mathématiques, il empêche surtout à notre pensée de fonctionner bondissante.
Jusqu’à quand ?